Questions... de bonne entente

Taux de majoration de la rémunération en région désignée

trois municipalités régionales de comté « d’exception »

Michel Desrosiers  |  2020-10-29

Les médecins qui exercent en région désignée bénéficient de majorations à leur taux de rémunération qui varient selon les régions, mais aussi selon l’endroit où sont rendus ces services (établissement ou cabinet). Les règles donnent encore lieu à des surprises pour certains médecins. Un tour d’horizon semble donc utile.

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Depuis la fusion de centres à vocation différente en de méga-établissements, les médecins sont mem­bres d’un CMDP regroupant plusieurs installations et obtiennent un statut de membre actif ou associé du CISSS ou CIUSSS correspondant. Ils en viennent à oublier que les majorations applicables dans les territoires désignés dépendent de leur statut dans certains centres, et non dans le méga-établissement dans son ensemble. Cela donne parfois lieu à des surprises, surtout dans le Bas-Saint-Laurent et les Hautes-Laurentides.

C’est l’Annexe XII qui définit les avantages liés à la pratique en région désignée et qui fixe les règles pour y avoir droit. Bien qu’il existe plusieurs mesures (ressourcement, sorties, frais de déménagement, etc.), l’avantage qui donne lieu au plus grand nombre de demandes à la Direction des affaires professionnelles est celui du taux de majoration des honoraires. Nous allons donc nous limiter à cette mesure.

Le cadre général

Les régions visées sont désignées dans un décret ministériel de 1985 qui a connu quelques modifications jusqu’en 1996, surtout pour tenir compte des modifications législatives, comme la création des conseils de santé et des services sociaux. Toutefois, les villes et villages touchés par le décret n’ont pratiquement pas changé depuis.

Aux fins de l’Entente, il y a une stratification des milieux en fonction de leur degré d’éloignement. Généralement, plus on s’éloigne des centres urbains de Montréal et de Québec, plus la majoration augmente. De plus, elle diffère selon que les services sont offerts en établissement ou en cabinet.

Il existe également des majorations dites « de rétention » qui s’additionnent à celle de base après un certain nombre d’années et selon certaines conditions supplémentaires. Ce traitement varie aussi en fonction des régions.

À l’exception de trois municipalités régionales de comté et de la Santé publique, les activités en établissement (centre hospitalier, centre d’hébergement et de soins de longue durée, centre de réadaptation) donnent automatiquement droit à la majoration, qui peut toutefois être réduite lorsque le médecin exerce en dépannage. En CLSC, le traitement dépend du type de CLSC.



Exception faite de la Santé publique et de trois municipalités régionales de comté, les activités en établissement donnent automatiquement droit à une majoration en territoire désigné. En CLSC, le traitement est particulier et varie selon le type de CLSC.

Dans deux régions, certaines municipalités régionales de comté font l’objet d’exigences particulières, soit celles d’Antoine-Labelle, de Kamouraska et de Rivière-du-Loup, à l’exclusion des municipalités de Saint-Cyprien, de Saint-Hubert, de Saint-François-Xavier-de-Viger et de Saint-Paul-de-la-Croix. Le médecin pratiquant dans ces régions a droit à la majoration applicable en établissement pour ses activités en centre hospitalier, en CHSLD, en centre de réadaptation et en CLSC, tant qu’il remplit une des conditions énoncées au paragraphe 1.2 de la Section I de l’Annexe XII (encadré). Ce paragraphe donne normalement accès à la majoration de la rémunération des services en cabinet, mais pas en établissement. À défaut de satisfaire à au moins une des conditions, le médecin ne peut se prévaloir de la rémunération majorée.



Dans quelques municipalités, la majoration applicable en établissement est fonction du respect d’une des conditions énoncées au paragraphe 1.2 de la Partie I de l’Annexe XII qui donne normalement accès à la majoration de la rémunération pour les services en cabinet.

La majoration applicable en CLSC est fonction de la nature du CLSC (membre du réseau de garde intégré ou non) et, lorsqu’il s’agit d’un CLSC du réseau de garde, de la participation du médecin à la garde sur place à l’urgence. Le médecin qui participe à la garde à l’urgence d’un CLSC du réseau de garde intégré reçoit le traitement applicable en établissement pour ses activités dans ce CLSC. Celui qui n’y participe pas ou qui exerce dans un CLSC qui ne fait pas partie du réseau de garde intégré a droit à la majoration (généralement celle qui s’applique en cabinet) seulement s’il remplit une des conditions du paragraphe 1.2 de la Section I de l’Annexe XII. En cabinet, le médecin peut se prévaloir de la majoration de base, seulement s’il remplit une des conditions énoncées au paragraphe 1.2 de la Section I de l’Annexe XII.

encadré

Des majorations dites « de rétention » peuvent s’ajouter à celles de base si le médecin respecte les exigences de la pratique principale continue. Le médecin en territoire désigné qui exerce également hors territoire pourrait ne plus satisfaire aux exigences et perdre ses majorations de rétention. La prudence est donc de mise.

Un risque qui ne saute pas toujours aux yeux est le fait pour un médecin qui exerce en territoire désigné d’y faire aussi du dépannage. Cette activité, lorsqu’elle est faite en territoire désigné, peut donner droit à la majoration de base, voire à des majorations de rétention. Toutefois, elle est traitée comme une activité hors région dans le calcul de la pratique principale continue du médecin et peut ainsi l’empêcher de conserver les majorations de rétention sur l’ensemble de sa pratique. Nous en avons déjà parlé dans la chronique de janvier 2004 (vol. 39, no 1). Les informations sont encore valables. La prudence est donc de mise.

Traitement particulier dans trois municipalités régionales de comté

L’enjeu des conditions du paragraphe 1.2 de la Section I de l’Annexe XII porte essentiellement sur les services en « cabinet ». De plus, dans les trois municipalités régionales de comté mentionnées précédemment, elle détermine aussi la majoration applicable en établissement. La réalité en cabinet est habituellement bien connue. Traitons donc de celle qui prévaut dans ces municipalités.

Le paragraphe 1.2 de la Section I de l’Annexe XII énonce les exigences qu’un médecin doit respecter pour avoir droit à la majoration dans les milieux visés (encadré). En plus des règles générales sur les nominations spécifiques, il y est précisé que la nomination spécifique pour les services obstétricaux ne suffit pas pour donner accès aux majorations, sauf si le CMDP de l’établissement le recommande. Une telle recommandation doit être formulée en raison de la vocation du centre hospitalier, de son volume d’activité, du nombre de médecins qui y exercent l’obstétrique et de l’emplacement géographique du centre et elle doit être communiquée à la RAMQ.



Il existe des enjeux particuliers pour les médecins exerçant en région qui font beaucoup de dépannage en région ou hors région.

En ce qui a trait aux nominations spécifiques, c’est le chapitre IV de l’Entente qui en décrit les conditions (paragraphe 10.00 A de la Brochure no 1) et qui détermine la charge de travail exigée. Outre les exigences pour les médecins à honoraires fixes, dont nous avons déjà traité, le CMDP doit considérer que la charge de travail du médecin qui pratique en CHSLD selon le tarif horaire ou à l’acte nécessite au moins douze heures par semaine. Les heures de garde en disponibilité pour le CHSLD sont comptabilisées à raison d’une heure par période de huit heures. La garde sur une semaine représente donc en général 13,5 heures, auxquelles s’ajoutent les heures des services sur place.

Le cadre décrit vise surtout à faire en sorte que le médecin remplisse certaines conditions pour avoir droit aux majorations prévues dans l’Entente. Ainsi, même si un établissement est en mesure d’accorder une nomination spécifique en centre hospitalier à un médecin, il ne le fera que s’il a des besoins dans cette installation. La nomination n’est pas automatique. De plus, l’établissement, qui voudra sans doute conserver des membres actifs en centre hospitalier, devra s’assurer d’un équilibre entre les exigences de ses divers membres. Si, en étant trop libéral dans l’octroi de nominations spécifiques, l’établissement transformait des membres actifs du centre en membres associés avec des nominations spécifiques, il pourrait avoir de la difficulté à pourvoir par le dépannage son déficit de couverture et ne se verrait pas nécessairement octroyer des postes additionnels au PREM.

Par ailleurs, une fois accordée, la nomination spécifique doit viser des activités réelles du médecin. Bref, elle ne constitue pas un moyen détourné de donner accès à la majoration en établissement ou en cabinet à un médecin qui n’exerce pas en centre hospitalier afin de le garder dans la région ou parce « qu’il le mérite », par exemple.



La situation qui donne le plus souvent accès à la majoration en cabinet est le fait de détenir un statut de membre actif en centre hospitalier, qui diffère du statut de membre actif d’un CISSS ou d’un CIUSSS.

Si vous travaillez en région désignée, portez une attention particulière au type d’installation prévu dans votre nomination comme membre actif. À défaut de pratiquer depuis au moins 21 ans, pour avoir droit à la majoration en cabinet, vous devrez le plus souvent détenir un statut de membre actif dans un centre hospitalier situé en région désignée ou dans un CLSC du réseau de garde situé en région désignée où vous participez à la garde sur place à l’urgence. Dans les trois municipalités régionales de comté mentionnées, vous devrez généralement posséder un tel statut pour bénéficier de la majoration applicable en établissement, contrairement à ce qui prévaut dans les autres régions désignées.

Informez-vous bien, afin d’éviter les surprises ! À la prochaine ! //