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Activité physique et réduction de la mortalité

des bienfaits un peu plus importants chez les aînés

Élyanthe Nord  |  2025-02-26

L’activité physique est associée à une baisse de la mortalité à tous les âges. Mais cette diminution serait un peu plus marquée chez les aînés, montre une étude comptant plus de 2 millions de personnes, publiée dans le JAMA Network Open1.

Les chercheurs, le Dr David Martinez-Gomez, de Madrid, et ses collaborateurs de plusieurs pays, ont analysé quatre mégacohortes issues des États-Unis, du Royaume-Uni, de la Chine et de Taiwan (encadré 1). Les participants, âgés de 20 à 97 ans, ont été suivis pendant une période médiane de 11,5 ans pendant laquelle quelque 177 000 décès sont survenus.

L’analyse révèle que l’âge modifie l’association entre l’activité physique et la mortalité. Ainsi, la réduction du risque de décès était plus prononcée chez les personnes âgées, en particulier lorsque la pratique d’exercice était importante. Par exemple, par rapport aux personnes sédentaires, celles de 70 ans et plus bénéficiaient d’une baisse du risque de 31 %, mais les jeunes de 20 à 29 ans de 16 % dans les groupes qui effectuaient quatre fois la quantité d’exercice officiellement recommandée (qui est de 150 minutes à une intensité modérée ou de 75 minutes à haute intensité par semaine, soit 7,5 MET-h/sem) (tableau).

Pour ceux qui pratiquaient uniquement la quantité habituellement conseillée, la réduction du taux de mortalité était de 13 % dans la tranche de 20 à 29 ans, mais de 15 % chez les septuagénaires et de 17 % chez les personnes de 80 ans et plus.

Par ailleurs, toutes les quantités d’exercice étaient bénéfiques. Ainsi, la moitié de la quantité recommandée officiellement, c’est-à-dire 11 minutes par jour (à une intensité modérée), était quand même liée à une diminution de 8 % des décès, tous les âges confondus.

On ne peut toutefois exclure la relation inverse entre activité physique et mortalité. Ainsi, la plus grande réduction du risque observée dans les groupes d'âges plus avancés pourrait refléter la capacité des participants de faire de l’exercice, souvent considérée comme un signe de vitalité, reconnaissent les chercheurs.

Pourquoi plus de bienfaits chez les aînés ?

MJuneau

« L’originalité de cette étude, qui est très impressionnante et très bien faite, est de montrer que ce sont chez les personnes de plus de 70 ans que l’efficacité de l’activité physique est la plus grande », affirme le Dr Martin Juneau, cardiologue et directeur de l’Observatoire de la prévention de l’Institut de cardiologie de Montréal.

Mais pourquoi l’exercice réduirait-il davantage la mortalité avec l’âge ? « Ce sont les maladies chroniques qui tuent les gens âgés, explique le spécialiste. Et l’activité physique a un effet très important sur tous leurs facteurs de risque. » Les maladies cardiaques, par exemple, constituent la première cause de décès chez les aînés.

Chez les jeunes, à l’opposé, l’activité physique n’a que peu d’influence sur les principales causes de décès. Ils meurent davantage de maladies transmissibles, de blessures, d’accidents et de suicide.

Comment convaincre les patients âgés ?

En tant que cardiologue, le Dr Juneau suit un grand nombre de patients du troisième âge. Chez ceux qui vont bien, il insiste beaucoup sur l’exercice. « L’activité physique permet de réduire les facteurs de risque des maladies chroniques, mais également d’éviter les chutes et la sarcopénie. J’aborde la question de l’exercice avec les patients en leur parlant de prévention des chutes, de conservation de la mobilité et de capacité à effectuer les activités quotidiennes sans épuisement. C'est plus concret que la diminution du risque de mortalité prématurée. »

Le médecin ne recommande pas seulement les activités aérobiques, mais aussi les exercices de résistance. Ainsi, en plus d’une marche de 30 minutes une ou deux fois par jour, il conseille à ses patients de soulever des poids, d’effectuer des squats et autres exercices pour augmenter leur force musculaire. « La préservation des quadriceps est importante pour pouvoir, par exemple, se lever de sa chaise. Monter les escaliers est une très bonne façon de conserver ses muscles. »

Mais bien des patients résistent. Le médecin insiste alors sur la physiologie. « Je leur explique : “Quand on est jeune et que l’on ne fait pas d’exercice, ce n’est pas grave, car nos muscles sont développés. On n’a pas encore de sarcopénie. On est capable de tout faire. Mais plus on vieillit, plus on perd de la masse musculaire si on ne fait pas d’activité physique. Et cela a beaucoup de conséquences pratiques à votre âge”. »

Certains aînés lui objectent que cela ne sert à rien de commencer l’exercice à cette phase de leur vie. « Je leur réponds que ce n’est pas un bon raisonnement. C’est comme les fumeurs qui me disent que ça ne sert plus à rien d’arrêter quand on est âgé. C’est faux. »

Combien de temps marcher ?

Concrètement, combien de temps faut-il faire chaque jour de l’activité physique selon l’étude du Dr Martinez-Gomez et de ses collaborateurs ? Leurs données globales correspondent à celles d’une grande étude taïwanaise de 2011 dont les résultats sont plus faciles à appliquer. « Ces travaux montrent que 15 minutes de marche quotidiennement sont associées à une baisse de la mortalité prématurée de 14 % par rapport à la sédentarité complète », indique le Dr Juneau2.

Chaque tranche additionnelle de 15 minutes d’exercice quotidien abaisse le risque de 4 % de plus. « Ainsi, si on en fait 30 minutes, la réduction de la mortalité est presque de 20 %. À partir de 90 minutes de marche par jour, on atteint un plateau. Il n’y a donc pas d’intérêt à dépasser 1,5 heure. » Ce chiffre correspond à environ quatre fois la quantité d’exercice officiellement recommandée, valeur qui, dans l’étude du Dr Martinez-Gomez, marque aussi un plafonnement.

Réduire la sédentarité

La pratique de l’activité physique est cruciale, mais la réduction de la sédentarité est également importante. « L’idéal est de combiner les deux, estime le Dr Juneau. On conseille de ne pas passer plus de 10 heures par jour complètement inactif, assis ou étendu sur un divan. Dès que vous dépassez ce seuil, la mortalité prématurée de nature cardiovasculaire monte en flèche. C’est exponentiel. »

Le cardiologue aborde cette question avec les médecins dans ses conférences. « Je leur dis : “Il faut vraiment recommander aux patients de se lever le plus souvent possible et de bouger dans la maison”. Simplement de se tenir debout est bénéfique. » Les cliniciens peuvent par ailleurs appliquer à eux-mêmes ce conseil. « Quand on se lève pour aller chercher les patients plutôt que de les appeler au micro, on évite de rester complètement immobile pendant une demi-journée. »

Des facteurs de santé plus favorables aux jeunes

Le Dr David Martinez-Gomez et son équipe ont comparé l’activité physique à six autres facteurs modifiables liés à la santé. Tous ont été associés à une diminution de la mortalité : un haut degré de scolarité (rapport de risques [RR] : 0,74), le fait de ne pas fumer (RR : 0,55) et de ne pas consommer régulièrement de l’alcool (RR : 0,99), un poids santé (RR : 0,88), une pression artérielle adéquate (RR : 0,83) et l’absence de diabète (RR : 0,61).

Les bienfaits de ces facteurs étaient plus importants chez les jeunes. « Même si la réduction du risque de mortalité associée au respect des quantités d’activité physique recommandées est restée stable ou a légèrement augmenté avec l’âge, les avantages liés à aux autres facteurs de santé ont diminué à mesure que l’âge avançait », ont découvert les chercheurs.

bibliographie

1. Martinez-Gomez D, Luo M, Huang Y et coll. Physical activity and all-cause mortality by age in 4 multinational megacohorts. JAMA Netw Open 2024 ; 7 (11) : e2446802. DOI : 10.1001/jamanetworkopen.2024.46802.

2. Wen CP, Wai JPM, Tsai MK et coll. Minimum amount of physical activity for reduced mortality and extended life expectancy: a prospective cohort study. Lancet 2011 ; 378 (9798) : 1244-53. DOI : 10.1016/S01406736 (11) 60749-6.

 

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