Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Le Collège des médecins et l’Ordre des infirmières se sont entendus pour demander au gouvernement de changer la loi de sorte qu’une infirmière puisse constater le décès et signer le constat dans certaines circonstances, en particulier lorsque le décès survient en CHSLD ou à domicile. Depuis mars 2015, le Collège a diffusé de l’information sur des modalités transitoires, en attendant que les modifications soient adoptées. C’est donc possible pour un médecin dans certaines conditions spécifiques de faire un constat de décès à distance avec la participation d’une infirmière. Depuis le 1er octobre 2019, il est même possible d’être rémunéré pour un tel service. Êtes-vous au courant ?
Depuis quelques années, un médecin dans un centre désigné (comme le Centre de coordination clinique du service d’urgence de Lévis) peut effectuer une évaluation de décès à distance avec l’assistance d’un ambulancier présent auprès du patient. Le médecin peut alors être rémunéré pour son évaluation (qui inclut le constat) et pour la rédaction du bulletin de décès (SP-3). Il s’agissait au départ d’un projet expérimental qui a depuis fait ses preuves. D’autres régions cherchent à adopter le même mode de fonctionnement.
Mais ce qui s’applique à des ambulanciers détenant une formation particulière n’était et n’est toujours pas d’application générale. Les modalités ne s’appliquaient donc pas en CHSLD ou dans le cadre d’un programme de maintien à domicile.
En centre hospitalier, les décès surviennent plus fréquemment que dans d’autres lieux, mais ils ne sont pas toujours « attendus » ou inévitables comme dans les CHSLD ou dans le cadre d’un programme de maintien à domicile. De plus, il y a généralement une présence médicale sur place en tout temps, ce qui réduit sensiblement le besoin de faire des constats de décès à distance. À domicile, l’équipe de soins est sur place de façon sporadique, tout comme en CHSLD où les médecins exercent plus souvent à temps partiel. Il n’y a pas de présence médicale en tout temps. L’obligation de se déplacer la nuit pour effectuer des constats de décès peut sembler un fardeau disproportionné et à faible valeur ajoutée lorsque le décès était attendu. Une telle obligation pouvait nuire au recrutement dans ces milieux.
Une rémunération a donc été convenue pour des constats à distance. Elle est limitée aux CHSLD et au décès à domicile de patients suivis par un programme de maintien à domicile. Pour dresser un tel constat à distance, le médecin doit de plus respecter les conditions énoncées par le Collège des médecins. Voyez son communiqué et consultez sa lettre aux établissements : www.cmq.org/nouvelle/en/modalites-transitoires-constat-de-deces.aspx.
Du fait de la position du Collège des médecins, le constat à distance doit se produire dans les circonstances décrites (encadré) et doit être fait par le médecin traitant du patient ou le dernier médecin ayant soigné la personne décédée (le médecin qui assure la garde en disponibilité répond à cette exigence). De plus, il doit découler des échanges du médecin avec le personnel infirmier ayant charge du patient et, au besoin, avec les proches du patient.
Lorsqu’un médecin réclame l’évaluation du décès à distance en dehors d’un centre désigné, c’est qu’il aura effectué le constat de décès en évaluant le patient, puis aura conclu à son décès et produit une attestation confirmant que le patient est décédé. Comme le constat de décès à distance peut seulement se faire lorsqu’il n’est pas nécessaire de faire appel au Bureau du coroner, le médecin devra, après le constat, remplir le bulletin de décès (le formulaire SP-3).
La nouvelle rémunération pour l’évaluation de décès à distance est limitée aux décès qui surviennent en CHSLD ou dans le cadre d’un programme de maintien à domicile et fait l’objet de certaines conditions fixées par le Collège des médecins. |
Un médecin dans un centre désigné peut procéder à l’évaluation d’un décès à distance avec la participation d’ambulanciers sur place. Contrairement au médecin du programme de maintien à domicile ou en CHSLD, il peut conclure au décès bien qu’il doive faire appel au Bureau du coroner ou demander, en cas d’incertitude, que le patient soit transporté en milieu hospitalier pour évaluation et traitement. Il ne remplira donc pas systématiquement le bulletin de décès, mais bien seulement s’il conclut au décès et n’a pas à faire appel au Bureau du coroner.
L’évaluation fait partie du dossier du patient. Par conséquent, le médecin devra noter sa démarche comme pour tout examen. Les proches du patient n’auront pas accès à ces informations en dehors de situations particulières. Le « constat de décès », quant à lui, comporte des renseignements très limités (le nom et la date de naissance du patient, le lieu et l’heure du décès, l’heure à laquelle le décès a été constaté et le nom et la signature du médecin). Dans certains milieux, il s’agira d’un formulaire préétabli (le Collège des médecins encourage d’ailleurs une telle pratique). Une copie sera remise à l’entreprise de pompes funèbres qui devra transporter la dépouille (ou aux employés du bureau du coroner qui devront effectuer le transport vers la morgue), de même qu’à la famille.
Enfin, le « bulletin de décès » (formulaire SP-3) comporte beaucoup d’informations spécifiques et confidentielles, dont la cause du décès. Ce formulaire est transmis au directeur des funérailles et au Bureau de la statistique du Québec, non aux proches. Le directeur des funérailles doit d’ailleurs y ajouter certaines informations concernant le traitement de la dépouille.
Le constat de décès comprend donc l’évaluation de la dépouille et le fait de dresser le constat tandis que le bulletin de décès constitue un service distinct.
Nous allons revenir sur chacune de ces démarches dans la chronique suivante et allons illustrer la conduite possible du médecin devant différentes situations, et la facturation qui est alors possible. D’ici là, bonne facturation ! //