Entrevues

Entrevue avec le Dr Sylvain Dufresne, président de l’AMOSO

prendre l’initiative des changements

2019-02-01

Nouveau président de l’Association des médecins omnipraticiens du Sud-Ouest, le Dr Sylvain Dufresne désire, avec la collaboration de son conseil d’administration, répondre aux besoins de ses membres, promouvoir les idées facilitant la pratique et dénoncer les faiblesses du système.

M.Q. — Comment voyez-vous votre travail de président ?

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S.D.– Je pense que le travail d’équipe est essentiel. Autant le président que les autres membres du conseil d’administration de l’association doivent être à l’écoute des besoins et des idées des médecins de notre région. Ces derniers, de leur côté, doivent nous les communiquer pour que l’on en débatte et qu’on fasse ensuite des propositions au conseil de la FMOQ ou à la commission des présidents de la Fédération.

M.Q. — Avez-vous des exemples d’idées qui pourraient être proposées ?

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S.D.– J’ai commencé à assister à des réunions du département régional de médecine générale dans d’autres régions que la mienne. Au cours de ces rencontres, certains médecins ont suggéré de faire des cliniques mobiles de renouvellement de médicaments pour les patients orphelins. Les cliniciens ont embarqué. Ce qu’il faut, c’est prendre des idées comme celle-là et en faire des outils. On peut les améliorer, au besoin, et mettre ensuite au point de nouvelles façons de faire.
Il faut prendre l’initiative des changements et arrêter de s’en faire imposer. On doit écouter les médecins qui nous disent : «  Dans ma région, j’ai besoin de telle chose ». Il faut, comme association, tenter de répondre à ces demandes. De la même manière, quand il y a des structures qui ne fonctionnent pas adéquatement, il faut les dénoncer. Il y a des dossiers que l’on va devoir défendre avec la FMOQ. Il faut travailler avec la Fédération, puis avec les instances gouvernementales et administratives pour apporter les changements nécessaires.

M.Q. — Quelles structures ne fonctionnent pas de manière optimale ?

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S.D.– Il y a des insatisfactions concernant, par exemple, Rendez-vous santé Québec (RVSQ), les centres de répartition des demandes de service (CRDS), les guichets d’accès au médecin de famille et l’accueil clinique. Ce sont des outils qui peuvent être utiles, mais que l’on doit parfaire.

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S.D.– xxx

M.Q. — Qu’en est-il de Rendez-vous santé Québec ?

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S.D.– Il y a certaines difficultés. Les opinions divergent au sujet du RVSQ. Certains médecins veulent lui donner sa chance tandis que d’autres s’y opposent pour différentes raisons. Plusieurs ne veulent pas l’employer tant qu’il ne sera pas mieux adapté aux besoins. Je pense que l’on doit prendre en considération ces différentes opinions et faire en sorte que les médecins puissent utiliser cet outil avec confiance. Il ne faut pas, par ailleurs, que les omnipraticiens soient obligés de recourir au RVSQ, mais plutôt qu’ils l’emploient parce qu’ils le veulent.

M.Q. — Et pour le CRDS ?

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S.D.– Autant le CRDS peut être utile, mais amélioré, autant certains aspects de son fonctionnement doivent être dénoncés. L’idée de base est intéressante : avoir un guichet pour faciliter la vie des patients. Mais il y a des lacunes importantes. Par exemple, dans une région périphérique de mon territoire, une patiente pouvait avoir accès à un neurologue de Montréal, à moins de 10 km de chez elle. Cependant, la clinique a refusé de la voir, car cette dernière n’était pas passée par le CRDS de Montréal. Le CRDS de la Montérégie a finalement envoyé la femme consulter un spécialiste à environ 60 km de chez elle, un an plus tard. C’est une absurdité territoriale importante que l’on doit corriger.

M.Q. — Quelle est la plus grande difficulté dont vous parlent vos membres ?

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S.D.– C’est le refus des spécialistes de voir le patient. Par exemple, certains peuvent nous demander de procéder au préalable à certains actes thérapeutiques que l’on a déjà faits, mais qui n’étaient pas inscrits sur le formulaire de demande. Parfois, un spécialiste, un orthopédiste par exemple, peut nous dire d’envoyer le patient voir un autre type de spécialiste, un physiatre, mais cette spécialité n’est pas offerte dans notre secteur.
Par ailleurs, un autre type d’absurdité réside également dans le fait que le CRDS ne veut pas traiter les cas relevant de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail. Ainsi, quand un patient se blesse dans son milieu professionnel, il n’a pas droit aux mêmes soins que s’il se blesse à la maison.

M.Q. — Et en ce qui concerne le guichet d’accès ?

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S.D.– La Montérégie Ouest compte quatre réseaux locaux de service. Leurs guichets se vident, mais deux, Vaudreuil-Soulanges et Jardin Roussillon, ont des problèmes à cause de l’importante mobilité de population sur leur territoire. Ainsi, parmi les nombreuses personnes qui s’établissent dans ces sous-régions, beaucoup gardent leur ancien médecin de famille. Elles ne peuvent pas s’inscrire dans un guichet près de chez elles, parce qu’elles perdraient leur médecin. Il nous faudrait donc, en réalité, beaucoup plus d’omnipraticiens dans la région que ce qu’indiquent les statistiques. En plus, quand ces nouveaux résidants tombent malades, ils consultent sur notre territoire. Cela augmente les demandes de soins dans les urgences et les GMF-R.

M.Q. — Et l’accueil clinique ?

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S.D.– En ce qui concerne l’accueil clinique, les patients sont vus sans tarder, mais l’évaluation et l’accès au plateau technique ne sont pas toujours aussi rapides qu’on pourrait le souhaiter. Ce service est par ailleurs limité par le nombre de spécialistes et par le fait qu’il n’y a pas d’hôpital dans certains sous-territoires.

M.Q. — Comment voyez-vous l’avenir de la médecine familiale à court terme ?

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S.D.– Depuis plusieurs années, les médecins sont très critiqués. Il y a énormément de propos négatifs à leur sujet. Arrive un moment où cela devient éprouvant mentalement. Bien des omnipraticiens qui ont travaillé très fort au cours des dernières années pour inscrire des patients et donner des soins à la population sont fatigués. Dans certaines régions, ils continuent à soutenir le système de santé malgré le manque de médecins. Il est temps que notre image change.
Moi, je vois de très belles initiatives en médecine familiale. On n’a qu’à regarder la clinique mobile de renouvellement de médicaments ou encore, dans une autre région, la clinique de grippe dont les heures d’ouverture ont été séparées entre les cabinets de différents pôles du territoire. Cela permet d’offrir des soins de proximité aux gens malades. Il s’agit d’une initiative d’un groupe de médecins qui ne concevaient pas que les patients ayant des symptômes infectieux aient à parcourir une distance considérable pour obtenir des soins essentiels.
La situation s’est améliorée. Les omnipraticiens ne s’en rendent pas toujours compte. Il y a quelques années, quand je rentrais au bureau, il y avait une file de gens qui arrivaient à cinq heures du matin pour voir un médecin. Depuis plusieurs années il y a eu énormément de changements, que ce soit l’accès adapté ou la disparition des files d’attente.

M.Q. — Que faut-il faire ?

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S.D.– Je pense qu’on a oublié tout le travail que l’on a accompli. On doit davantage faire la promotion de nos réussites. La Fédération le fait avec la campagne « Prendre soin de vous » qui présente de belles histoires de médecine familiale. Dans nos associations, on doit également faire connaître nos réalisations. Ensuite, les mentalités et les discours vont changer.
Nous, comme association, on doit écouter les besoins des médecins et travailler à y répondre. Cela va nous permettre d’avoir une meilleure pratique et de ressentir du plaisir à pratiquer. On va transmettre cette satisfaction aux jeunes médecins. Je veux qu’ils soient aussi fiers d’être médecins de famille que je le suis. //