Droit au but

Le PREM, le PEM, l’avis de conformité et l’avis de nomination… démêlés !

Pierre Belzile  |  2019-02-04

Jean-Philippe, jeune médecin ayant peu d’expérience des questions médicoadministratives au sein du réseau de la santé, vient d’être nommé au comité de direction du Département régional de médecine générale, le DRMG, de la région de la Grande-Montagne. La chef du DRMG, la docteure Isabelle, s’empresse de tester les connaissances de la nouvelle recrue au sein de son équipe.

Me Pierre Belzile, avocat, est directeur du Service juridique de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Elle lui demande ce que signifie « avoir un PREM », « avoir un PEM » ? Quelle est la différence entre les deux ? Un avis de nomination se rattache-t-il au PREM ? Lorsqu’on parle d’obtenir un avis de conformité, de quoi est-il question au juste ? Les pensées de Jean-Philippe s’entremêlent. Son assurance à l’égard des subtilités administratives du milieu de travail des médecins omnipraticiens devient soudai­ne­­ment chambranlante.

Seriez-vous capables de bien présenter les choses ? Voyons ça de plus près.

Les PREM : qu’est-ce que c’est ?

Les plans régionaux d’effectifs médicaux, les PREM, sont le résultat d’un exercice de planification et d’organisation des services, l’objectif étant de déterminer les besoins d’une région en effectifs médicaux. Cette distribution de la main-d’œuvre médicale est établie non seulement entre chacune des régions du Québec, mais aussi entre les différents sous-territoires de chacune d’entre elles.

En médecine familiale, les PREM sont produits annuellement par le ministère de la Santé et des Services sociaux. La FMOQ, par l’entremise d’un comité de gestion des effectifs médicaux composé de représentants de la Fédération et du ministère de la Santé, participe également à l’exercice.

La planification des PREM a donc pour objet de favoriser, le plus équitablement possible, la bonne répartition des médecins entre les territoires, conformément aux besoins de la population et à son accès aux services médicaux.

Pour déterminer les besoins, le modèle de planification des PREM tient compte des besoins des établissements en main-d’œuvre médicale, ainsi que de ceux en médecine familiale de première ligne. Au terme de l’exercice, les PREM recensent les divers territoires et sous-territoires où il est prioritaire de combler les besoins en main-d’œuvre médicale. C’est ainsi que le ministre fixe annuellement, selon les régions, ses objectifs de croissance ou de décroissance.

Les DRMG jouent un rôle important dans la création des PREM. En vertu de la loi, ils ont la responsabilité, à l’égard du ministre, de faire des recommandations sur la partie du PREM relative aux médecins omnipraticiens.

D’où vient l’obligation d’établir des PREM ?

L’obligation pour le ministre de la Santé et des Services sociaux de produire un PREM provient de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Les PREM ont donc une origine législative.

Les modalités d’application de ces plans à l’égard des médecins omnipraticiens relèvent quant à elles d’une entente négociée, dans la foulée de la loi, entre le ministre et la FMOQ, soit l’Entente particulière relative au respect des PREM.

Que veut dire l’expression « avoir un PREM » ?

Dans le jargon des médecins omnipraticiens, « avoir un PREM » signifie plus précisément être détenteur d’un avis de conformité au PREM auprès d’un DRMG. Un médecin ne peut avoir qu’un seul avis de conformité à la fois.

Comme nous venons de le mentionner, la procédure de délivrance des avis de conformité au PREM à l’égard des médecins de famille, tout comme la gestion de ces avis, a été négociée par la FMOQ.

Les règles de l’entente prévoient que si un médecin ne veut pas subir une réduction de sa rémunération, il doit obtenir un avis de conformité au PREM de la région dans laquelle il exerce ou dans laquelle il aimerait pouvoir exercer. La demande doit être adressée au DRMG de la région concernée.

Une seule condition est liée à l’obtention d’un avis de conformité au PREM : effectuer sur une base annuelle, soit du 1ermars au 28février de l’année suivante, au moins 55 % de ses journées de facturation dans le cadre du régime public dans le territoire ciblé par l’avis de conformité. Aucune autre condition ne s’y ajoute.

Bien des particularités viennent teinter les règles de gestion des avis de conformité aux PREM. Nous restons ici volontairement dans les grands principes.

L’avis de conformité au PREM se

rattache-t-il à un milieu de pratique ?

Non. Un avis de conformité au PREM n’a qu’une portée géographique. Il n’est pas lié à un milieu de pratique (un GMF, un hôpital, un CLSC, par exemple). On entend parfois des médecins dire : « j’ai un PREM dans tel ou tel hôpital ». Un médecin ne détient pas un avis de conformité au PREM dans un établissement, mais plutôt dans un espace territorial.

Lorsqu’un DRMG doit sélectionner un médecin entre plusieurs autres pour une seule place dans son PREM, il le fera bien entendu en souhaitant que le candidat choisisse de combler un ou des besoins très spécifiques de la région. Toutefois, l’accomplissement d’activités spécifiques ne pourra constituer une condition de maintien de l’avis de conformité au PREM. Si des médecins doivent obligatoirement consacrer une partie de leur temps à des activités prioritaires, ils le feront en vertu des règles propres aux activités médicales particulières, les fameuses AMP, et non en raison de leur avis de conformité au PREM.

Les PEM, qu’est-ce que c’est ?

Les plans d’effectifs médicaux (PEM) se situent à l’échelle des établissements pour la majorité des médecins en CISSS et en CIUSSS. Les PEM sont des plans d’organisation qui visent à assurer la bonne gestion de la main-d’œuvre médicale à l’intérieur de toutes les installations d’un établissement, un hôpital, un CLSC, un CHSLD ou un centre de réadaptation, par exemple.

Les plans d’organisation des CISSS et des CIUSSS indiqueront le nombre de médecins qui peuvent exercer leur profession dans chacun des départements et services. Un médecin ne peut donc pas, de sa seule volonté, se joindre aux effectifs médicaux d’un établissement. Encore faut-il qu’il y ait une place pour lui dans le PEM et que l’octroi de cette place par l’établissement soit approuvé par le ministère de la Santé et des Services sociaux.

Il ne faut ainsi pas confondre PEM et PREM. Le PREM est le plan des effectifs à l’échelle d’une région. Il tient bien évidemment compte des besoins en effectifs à l’intérieur des établissements, mais également des besoins en effectifs à l’extérieur de ceux-ci, comme dans les cliniques médicales.

Le PEM ne concerne que les besoins en effectifs à l’intérieur d’un établissement.

D’où vient l’obligation d’établir un PEM ?

Tout comme les PREM, l’obligation pour les établissements de produire des PEM provient de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Les PEM ont donc eux aussi une origine législative. Comme nous l’avons mentionné précédemment, les PEM constituent une partie des PREM.

« Avoir un PEM » et avoir un avis de nomination en établissement, est-ce la même chose ?

L’expression « avoir un PEM » signifie tout simplement, dans le langage des médecins, faire partie du plan des effectifs médicaux d’un établissement. Autrement dit, dans ce contexte, « avoir un PEM » est une autre façon d’exprimer le fait qu’un médecin détient un avis de nomination au sein d’un établissement, qu’il y a un statut et qu’il y exerce des privilèges. Alors oui, « avoir un PEM » et avoir un avis de nomination en établissement veulent dire la même chose.

En 2017, la loi 130 est venue bousculer le régime de délivrance des avis de nomination en établissement. Nous dirigeons nos lecteurs à l’article intitulé : « Mise en œuvre de la loi 130, l’entente de principe négociée par la FMOQ », parue dans le numéro de juillet 2018 du Médecin du Québec pour de plus amples renseignements à ce sujet.

Conclusion

À titre de nouveau membre du comité de direction du DRMG, Jean-Philippe est maintenant en meilleure posture pour bien apprécier la portée des mots et des formules en matière de plans d’effectifs et de gestion de la main-d’œuvre médicale. Mais il lui en reste encore beaucoup à apprendre ! //