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Urgence

attention aux erreurs de diagnostic

Emmanuèle Garnier  |  2019-03-04

Au Canada, au cours des dernières années, de nombreux médecins ont fait l’objet de poursuites à cause d’erreurs de diagnostic. Le lieu où elles ont été le plus souvent commises ? L’urgence. Et, inversement, la raison la plus fréquente de poursuites de médecins d’urgence est l’erreur de diagnostic.

Urgence

Entre 2013 et 2017, parmi les 486 cas de poursuites liées au diagnostic que l’Association canadienne de protection médicale (ACPM) a réglés, 51 % concernaient un médecin d’urgence. Il pouvait s’être trompé de diagnostic, ne pas avoir détecté l’affection du patient ou avoir retardé la découverte du problème, indique le site Internet de l’organisme.

Les conséquences de ces mauvais diagnostics ont été graves. Presque tous les patients ont subi un préjudice, et certains sont morts.

La cause de ces diagnostics erronés ? Dans près de 60 % des cas, le médecin n’avait pas fait un examen physique adéquat ou n’avait pas effectué une anamnèse suffisante. En outre, dans 50 % des dossiers, il n’avait pas prescrit les examens diagnostiques nécessaires ou n’avait pas assuré un suivi convenable.

« La chose à laquelle les médecins doivent vraiment faire attention, c’est la pression qu’ils subissent de la part du système pour aller plus vite. Cela peut les pousser à faire une anamnèse ou un examen physique qui ne sont pas aussi complets qu’ils devraient l’être. Les cliniciens doivent réfléchir à la question. S’ils veulent aller plus vite, ils doivent déterminer quel aspect de leur pratique ils doivent ajuster. L’examen physique et l’anamnèse ne sont pas les étapes par où il faut commencer », explique la Dre Lisa Calder, directrice du Service d’analyse des soins médicaux à l’ACPM.

Les examens diagnostiques aussi posent un problème. Selon les experts qui ont analysé les dossiers de poursuites, certains médecins n’avaient pas prescrit les bons examens ou avaient travaillé à partir de résultats inadéquats, comme une radiographie mal cadrée. Parfois, le médecin avait tardé à revoir ou à donner suite à un résultat inquiétant. Certains avaient mal interprété ou mal lu un résultat d’examen.

Biais cognitifs

Divers facteurs peuvent mener à une erreur de diagnostic. Certains sont liés au médecin lui-même, comme les biais cognitifs. Deux types sont particulièrement nuisibles à l’urgence : le biais de satisfaction au cours d’une recherche et la conclusion prématurée. Dans le premier cas, le praticien cesse de chercher une fois qu’il a découvert un élément. Dans le second, il pose un diagnostic avant d’avoir fait toutes les vérifications nécessaires, explique le site de l’ACPM.

Souvent, cependant, les cliniciens ne sont pas les seuls responsables du problème de diagnostic. Des facteurs concomitants interviennent. Par exemple des erreurs du système, comme des résultats jamais transmis ou remis au mauvais clinicien. « Les médecins doivent s’assurer que leur système est capable de suivre tous les résultats. C’est particulièrement important pour les cliniciens de l’urgence qui ne sont pas toujours à l’hôpital. Ils peuvent demander un examen diagnostique et partir à la fin de leur quart de travail. Les autres médecins et infirmières doivent faire le suivi », explique la Dre Calder.

Il y a aussi les problèmes de communication. Un spécialiste ou une infirmière qui n’a pas transmis au médecin de l’urgence certains aspects importants de l’anamnèse. Le médecin d’urgence qui a omis de donner d’importantes instructions aux infirmières ou d’informer son collègue de la gravité de l’état du patient au moment du transfert de soins. « La communication est l’un des problèmes les plus fréquents des dossiers médicolégaux que l’on traite à l’ACPM. On essaie de travailler avec les médecins pour améliorer cet aspect », affirme la Dre Calder.

Exercer à l’urgence n’est donc pas facile. Différents facteurs viennent compliquer le travail et en font un milieu particulièrement propice aux erreurs de diagnostic. //