Parlons « performance » du réseau sérieusement un instant. Savez-vous qu’en ne respectant pas ses obligations du programme GMF, le gouvernement du Québec contribue lui-même annuellement à la perte d’environ 750 000 rendez-vous médicaux par année ? En effet, si on misait davantage sur l’organisation optimale du travail et la franche collaboration, et non sur l’ajout de structures et de projets de loi contre-productifs, les médecins de famille pourraient être encore plus « performants » ? Si seulement ces derniers avaient accès au personnel promis dans des ententes signées par le gouvernement lui-même, oui, ce serait possible !
Au cours des dernières années, vous avez été toujours plus nombreux à nous indiquer que vous respectiez l’entièreté de votre part du contrat, mais que les CISSS et les CIUSSS, à l’opposé, ne fournissaient pas toujours les effectifs promis, pourtant budgétés en vertu d’obligations contractuelles. Après compilation, la FMOQ évalue qu’il vous manque en moyenne entre 20 % et 25 % des ressources professionnelles auxquelles vous avez droit en GMF.
Les postes non pourvus par les établissements sont ceux d’infirmières, d’IPS, de travailleurs sociaux, de pharmaciens, de physiothérapeutes, d’ergothérapeutes, de coordonnateurs, de techniciens, etc. Bref, du personnel et des professionnels fort précieux pour soutenir votre travail quotidien, accroître la qualité des suivis et… offrir davantage de rendez-vous à la population.
Selon la littérature scientifique, une approche misant sur une équipe complète qui prodigue des soins intégrés (modèle de type PCMH) permet d’accroître le nombre de patients vus de 20 % à 30 %, comparativement à un modèle reposant exclusivement sur le médecin. Et nous sommes d’accord avec ce modèle !
En utilisant des données conservatrices et en tenant compte de la perte d’efficacité attribuable au nombre de postes demeurés vacants, la FMOQ estime que chaque médecin de famille qui pratique en ce moment en GMF pourrait dégager en moyenne 130 rendez-vous de plus par année. Pour l’ensemble du Québec, cela représente environ 750 000 rendez-vous de perdus !
Malgré une grave pénurie évaluée à plus de 2000 médecins de famille, ces derniers ont ouvert près de 1 000 000 de rendez-vous de plus aux Québécois grâce au GAP. Imaginez ce qu’ils pourraient accomplir si le gouvernement respectait simplement sa part du contrat !
À la rencontre des GMF
Du 21 mai au 5 juin derniers, la FMOQ a tenu cinq grandes rencontres des chefs de GMF, dont un webinaire, pour discuter spécifiquement des problèmes en GMF. Les échanges ont permis de faire le point sur le programme, de mieux comprendre vos réalités et, surtout, d’imaginer l’avenir.
Voici les éléments clés qui sont ressortis de ces rencontres très riches en échanges :
8 le programme GMF devrait être négocié avec la FMOQ et non contracté directement avec les médecins ; 8 le contrat devrait prévoir une hausse du nombre de professionnels et, bien évidemment, être respecté dans son entièreté par le gouvernement ; 8 une indexation du financement est nécessaire pour absorber l’accroissement des charges financières ; 8 un meilleur soutien en gestion et en utilisation des données numériques est souhaité.Mais surtout, une question lancinante demeure : est-ce que les médecins de famille devraient se retirer du programme GMF ?
S’il existe de nombreux avantages connus à faire partie d’un GMF, nous avons observé et ressenti un mécontentement palpable de la part d’une majorité de membres sondés et rencontrés.
Or, ne nous méprenons pas : tout ça est intimement lié. Œuvrer dans un contexte d’affrontement perpétuel et ressentir jour après jour que sa profession est dénigrée et dévalorisée mènent inéluctablement à une démobilisation sur le terrain. C’est ce à quoi nous assistons en ce moment. C’est plus que regrettable, c’est tragique, car ce sont les patients comme les médecins qui en font les frais.
Du côté de la Fédération, notre engagement demeure clair. Nous souhaitons encore et toujours collaborer avec les autorités pour choisir des solutions innovantes et durables afin de faciliter le meilleur accès qui soit aux Québécois, pour soutenir les travailleurs du réseau et pour valoriser la médecine de famille. Notre devoir premier est non pas de « tendre l’autre joue », mais plutôt de rester concentrés à chercher des solutions gagnantes pour la population, gagnantes pour les médecins de famille et gagnantes pour le gouvernement.
Le 1 octobre 2025

Président de la FMOQ, |