Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Différents volets de la pratique d’obstétrique donnent régulièrement lieu à des questions de la part des médecins qui y exercent. Provocation du travail et déplacement urgent pour effectuer un examen ou pour l’accouchement. Seriez-vous de ceux qui se posent encore des questions ?
Nous recevons toujours des questions sur la facturation permise pour les accouchements et les soins post-nataux. Les parties négociantes ont d’ailleurs récemment demandé à la RAMQ de réviser ses validations pour les déplacements d’urgence. Profitons-en pour les revoir ensemble.
Déclenchement du travail
Selon la situation, la provocation du travail peut se faire sur plusieurs jours, et les patientes peuvent revenir périodiquement au service de consultation externe ou être hospitalisées. Comment sont traitées ces situations ?
D’abord, notez bien qu’on parle de déclenchement du travail ou de la « provocation médico-chirurgicale du travail », et non de stimulation du travail. Pour être payable, le déclenchement du travail doit être requis en raison d’une complication obstétricale, comme une grossesse de plus de 41 semaines ou une rupture des membranes sans contractions.
La stimulation, quant à elle, est utilisée lorsqu’une patiente est en travail et qu’il faut augmenter la force ou la fréquence des contractions. Sa rémunération est incluse dans celle de l’accouchement et ne se facture donc pas distinctement, contrairement au déclenchement.
Que la patiente se rende en consultation externe ou qu’elle soit hospitalisée, elle pourra nécessiter des interventions sur plus d’une journée. On lui administrera un produit ou on lui posera des tiges laminaires ou les deux. La patiente sera réévaluée quotidiennement, selon l’évolution de son état.
La RAMQ contrôle le code de déclenchement du travail par jour. Il est donc facturable une première fois et inclut la surveillance durant les trente minutes qui suivent, s’il y a lieu. S’il y a d’autres examens ou contrôles le même jour, la facturation sera fonction du contexte (consultation externe ou hospitalisation).
Après la première demi-heure, dans le cas d’une patiente ambulatoire, chaque examen sera payé tant qu’il y a une indication et que le libellé est respecté (nature de l’examen).
Lorsque la patiente est hospitalisée et que le travail (même la latence) n’est pas commencé, après la première demi-heure, il est possible de facturer des visites auprès de la patiente hospitalisée. Toutefois, après la première visite, la rémunération des visites additionnelles le même jour est conditionnelle à un changement de l’état de la patiente (modulation de la douleur, apparition de frissons ou température, saignement anormal), et non seulement d’une volonté de voir si le col se dilate. Si les visites supplémentaires exigent un déplacement d’urgence, elles sont payables au plein tarif. Autrement, elles le sont à tarif réduit par rapport à la visite de suivi initiale.
Une fois le travail commencé (y compris la phase de latence), il n’est plus possible de facturer des visites, que la patiente se soit présentée aux consultations externes ou en obstétrique. Les services en question font alors partie de ceux de la rémunération forfaitaire de l’accouchement.
Peu importe où se trouve la patiente, il est possible de facturer la visite, plus le déclenchement du travail la première fois. Si la patiente est revue le lendemain, il sera alors possible de réclamer une nouvelle visite, tant que le travail n’est pas commencé. Si le médecin pose de nouveau des gestes liés au déclenchement du travail, il pourra encore facturer ce service (code 06921, 41,65 $) une fois dans la journée, tant que le travail n’est pas commencé. Si le médecin change en cours de journée, le suivant devra s’en tenir à la facturation des visites sans réclamer de rémunération pour le déclenchement du travail. À partir du moment où le travail commence, tout change.
Le début du travail (même la phase de latence) met fin à la possibilité de facturer des visites ou le déclenchement du travail. S’il y a administration d’un produit pour stimuler les contractions, la stimulation du travail est alors incluse dans les services rémunérés selon les règles prévues pour l’accouchement. Par ailleurs, comme la rémunération de l’accouchement s’applique, les médecins qui se succèdent peuvent se partager la rétribution de l’accouchement.
Le code pour le déclenchement du travail est facturé une fois par jour pour une même patiente et inclut la surveillance durant les trente minutes qui suivent, s’il y a lieu.
Il n’y a pas de nombre de jours maximal durant lesquels il est possible de réclamer la rémunération du déclenchement artificiel du travail, du moins pas sur le plan de la validation de la facturation. La réalité biologique impose toutefois des limites plus concrètes qui font en sorte qu’il pourra devenir nécessaire d’avoir recours à une césarienne.
Déplacement pour se rendre à l’hôpital
Il faut distinguer le supplément pour le service de la compensation des frais de kilométrage.
Supplément
Un supplément est prévu lorsqu’un déplacement d’urgence auprès d’une patiente hospitalisée est requis (Préambule général 2.2.6 D 6). Le montant est modulé selon la période de la journée (jour, soir, nuit : codes 15644, 15645 et 15646, respectivement). Toutefois, le déplacement doit correspondre à ce qui est prévu au paragraphe 2.4.7.1 du Préambule général : « le déplacement doit être requis de façon urgente pour effectuer un examen et ne doit pas coïncider avec le déplacement requis pour faire une tournée ou assurer une garde ». Dans le cas des patientes hospitalisées, le supplément est payable sans égard à la plage horaire (tout comme pour la visite à domicile auprès du patient en perte importante d’autonomie). Pour les déplacements au cabinet ou à domicile pour des patients qui ne sont pas en perte importante d’autonomie, le supplément est seulement payable durant certaines plages.
On parle ici d’un examen ou d’une visite auprès d’une patiente hospitalisée. Lorsque la visite est facturée seule ou de façon distincte d’un autre service dont le tarif est de 60 $ ou moins (comme l’examen de réactivité fœtale), le médecin devra indiquer que le déplacement est urgent pour se prévaloir du supplément. Comme la visite en association avec un acte de l’onglet « Obstétrique » dont le tarif dépasse 60 $ est seulement payable en contexte d’urgence, le médecin aura déjà indiqué qu’il s’agit d’un service urgent (épreuve à l’ocytocine, transfusion intra-utérine). Auparavant, la RAMQ ne payait pas le supplément pour déplacement d’urgence pour effectuer un examen compris dans un service (consultation et gestes obstétricaux ou accouchement). Les médecins n’indiquaient donc pas l’heure de déplacement ni que l’examen avait été fait dans un contexte d’urgence. Toutefois, de l’avis des parties négociantes, le supplément pour le déplacement d’urgence doit s’appliquer. La RAMQ en a été informée et doit mettre en place une modalité pour identifier de telles situations. Lors de l’accouchement, on s’attendrait à ce que de tels déplacements soient rares dans les milieux où un médecin assure la garde sur place pour les services obstétricaux. Toutefois, dans des milieux à faible volume, il pourrait y avoir plus d’un déplacement d’urgence pour effectuer un examen durant le travail de la même patiente. Chaque déplacement urgent pourrait alors faire l’objet du supplément. La rémunération de l’accouchement étant forfaitaire, l’examen n’est pas facturable. Seul le supplément de déplacement d’urgence l’est, et seulement si la patiente est hospitalisée. Ainsi, un déplacement d’urgence auprès d’une patiente ambulatoire au service de consultation externe ne donnera pas droit au supplément.
Le début du travail (y compris la phase de latence) met fin à la possibilité de facturer des visites ou le déclenchement du travail. La stimulation du travail est incluse dans les services de l’accouchement.
La nuit (entre 0 h et 7 h), une autre possibilité existe (Préambule général, paragraphe 1.5), soit de se prévaloir du montant forfaitaire (code 09099, tarif 140,25 $) lors d’un appel d’urgence qui exige un déplacement auprès d’une patiente en établissement. Ce montant forfaitaire remplace la rémunération de l’ensemble des services effectués lors du déplacement. Il n’est pas accessible pour la patiente en travail, mais peut s’appliquer à une patiente ambulatoire évaluée de façon urgente à la salle d’accouchement durant la nuit. Il va sans dire que le médecin qui se prévaut du montant forfaitaire pour se rendre auprès d’une patiente hospitalisée ne pourra pas en plus réclamer le supplément de déplacement d’urgence, car la compensation pour le déplacement est incluse dans le montant du forfait.
Frais de kilométrage
L’autre composante de la compensation pour le déplacement d’urgence concerne les frais de kilométrage (Préambule général 2.4.2). Dans le cadre de la pratique obstétricale, cette compensation est possible lors d’un déplacement à l’hôpital qui se solde par un accouchement. Elle se mesure à partir du lieu principal de pratique du médecin. Par ailleurs, le médecin doit réduire la distance réclamée de 10 km et facturer distinctement les trajets aller et retour. L’exclusion des dix premiers kilomètres limite l’intérêt de cette compensation. Le code applicable est le 09991. Lors de la facturation, en plus de préciser s’il s’agit de l’aller ou du retour, il faut indiquer l’élément de contexte applicable, soit « Déplacement à l’hôpital pour une parturiente dont le travail se termine par un accouchement ».
Ce code pourrait s’appliquer dans le cas du déplacement à la salle d’accouchement pour évaluer une patiente qui s’avère être en travail et qui accouchera de façon précipitée. Cette compensation ne devrait pas être facturée à répétition pour la patiente en travail.
Espérons que ces informations vous aideront à vous y retrouver et à vous concentrer sur d’autres questions que la facturation. Bonne facturation !