Nouvelles syndicales et professionnelles

Loi 2 et détresse des médecins
Du jamais vu dans l’histoire du PAMQ

Nathalie Vallerand | 5 novembre 2025


Depuis l’adoption du projet de loi 2, le 25 octobre dernier, le Programme d’aide aux médecins du Québec (PAMQ) reçoit un nombre anormalement élevé d’appels téléphoniques et de courriels provenant de médecins en détresse. « C’est une crise sans précédent. Depuis 35 ans que le Programme existe, nous n’avons jamais observé autant de désarroi dans la communauté médicale », constate la Dre Claude Johnson, médecin-conseil et codirectrice médicale de l’organisme.

En seulement quelques jours, les demandes d’aide ont doublé, selon les estimations de l’organisme. Les cliniciens qui vivaient déjà des difficultés avant le bras de fer avec le gouvernement seraient particulièrement touchés par la situation. « Ces médecins, aux prises avec des problèmes de santé ou des difficultés d’ordre personnel, avaient déjà une capacité de travail limitée. Devant certaines dispositions de la loi 2, ils sont anxieux, tristes et plusieurs sont même en grande détresse », déplore la Dre Johnson.

La médecin-conseil souligne également que les médecins dont l’horaire est allégé pour des raisons légitimes risquent d’être doublement pénalisés financièrement, puisque la nouvelle loi prévoit des pénalités pour ceux qui travaillent moins.

Par ailleurs, les cliniciens qui demandent de l’aide au PAMQ se disent inquiets quant à la qualité des soins, affirme l’organisme dans un communiqué. Ils estiment aussi que la loi 2 leur impose des obligations impossibles à assumer. Certains sont si désemparés qu’ils ont du mal à poursuivre leur travail. Des médecins gestionnaires, de leur côté, vivraient un conflit moral devant les dispositions de la loi 2 qui les contraint à un rôle de surveillance auprès de leurs collègues.

Des soignants déjà à bout de souffle

La loi 2 pourrait fragiliser davantage la santé psychologique des médecins. En effet, le Sondage national sur la santé des médecins 2025, de l’Association médicale canadienne, révèle que les médecins connaissent toujours, cinq ans après la pandémie, des taux élevés d’épuisement professionnel et de dépression. Comment s’en sortir ? « Normalement, il faut prendre soin de sa santé, prendre du temps pour soi, répond la Dre Johnson. Mais la loi 2 produit l’opposé. Elle demande aux cliniciens d’en faire plus sous peine de sanctions. »

Malgré l’afflux de demandes d’aide, la codirectrice médicale invite les médecins à ne pas hésiter à contacter le PAMQ. Le 31 octobre dernier, l’organisme réussissait encore à répondre aux demandes en 24 à 48 heures. Il offre un service de soutien entre pairs où les médecins en détresse peuvent se confier en toute confidentialité à un collègue qui les aide à trouver des solutions et des ressources. « Les médecins aiment le fait d’être jumelés avec quelqu’un qui comprend leur réalité. Et s’ils ont besoin de consulter, nous pouvons les diriger vers une psychologue, un psychiatre ou un autre des professionnels qui collaborent avec nous », indique la Dre Johnson qui conseille par ailleurs aux médecins en état de choc de faire une pause avant de prendre des décisions concernant la suite de leur carrière.

Enfin, le PAMQ met à la disposition des médecins quelques outils en ligne pour reconnaître leurs signes de détresse et favoriser leur bien-être. On y trouve, par exemple, un formulaire d’autoévaluation en situation de stress aigu qui permet aux praticiens de s’assurer de leur capacité à effectuer leurs tâches cliniques. Le Baromètre de la santé psychologique, pour sa part, aide les médecins à préserver leur équilibre lors d’un stress prolongé ou d’un événement troublant tandis que des webinaires de l’ergothérapeute Rachel Thibeault leur donnent des clés pour développer leur résilience et ainsi mieux faire face aux épreuves de la vie.

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